Le
lagunage,
considéré comme une filtration
naturelle, revient grandement à la mode. Dérivé des procédés d'épuration
des eaux domestiques ou industrielles, ce principe permet de filtrer l'eau
grâce à l'action combinée des supports bactériens et des plantes aquatiques.
Dans les stations d'épuration, le lagunage
intervient en dernière phase, avant la dispersion des eaux dans le milieu
naturel. Au préalable les déchets présents dans l'eau sont éliminés par le
dégrillage (retient les gros déchets), le tamisage (retient les éléments
plus fins), le dessablage (recueille la terre, le sable), le déshuilage
(enlève les matières grasses). Ensuite la décantation primaire permet de
recueillir sous forme de boues la majorité des matières en suspension (MES).
Le traitement biologique de l'eau transforme
les matières organiques polluantes en matières minérales stables (nitrates,
phosphates, carbonates). Cette opération s'effectue sur des lits bactériens
(sur supports poreux) ou par le biais d'agitation ou d'aération. Les
traitements physico-chimiques permettent de compléter l'épuration de l'eau. Il
peut s'agir de floculation (précipitation des MES), de centrifugation (si
décantation des MES faible), de filtration (MES peu nombreuses). Le traitement
des MES par oxydation et réduction chimique ou par osmose inverse permet
d'atteindre une épuration à 90%. Le reste est traité par épuration
naturelle. Ce n'est donc qu'à ce moment qu'intervient le lagunage.
Cette technique d'épuration s'est développée en
France dans les années 70. Le principe de traitement se base sur des temps de
séjour assez long dans des bassins. L'épuration par lagunage est réalisée
grâce à un équilibre biologique auquel participent des bactéries, du
zooplancton, des algues et des plantes aquatiques (lagunage à macrophytes).
Les algues sont des plantes microscopiques contenant
de la chlorophylle permettant la photosynthèse (possible jusqu'à une
profondeur de 50 cm).
Les bactéries
(micro-organismes de très petite taille) assimilent la matière organique et
rejettent du CO2 et des matières
solubles. Au fond du bassin les bactéries sont anaérobies (zone anoxique :
absence d'oxygène) et à la surface aérobies (présence d'air). Ces dernières
consomment l'oxygène provenant des échanges entre l'air et l'eau et celui
généré par la photosynthèse. Si les bactéries augmentent excessivement, la
consommation d'oxygène sera trop forte d'où un risque pour la faune (poisson).
Le zooplancton, animaux de petite taille
(daphnie, cyclopes... ) se nourrissent en filtrant l'eau et prolifèrent en
période chaude.
Les plantes (macrophytes) ont un rôle de
support filtrant et d'assimilation
des formes minérales de l'azote et du phosphore notamment.
Il faut savoir que, pour les bassins d'agrément, l'inconvénient principal
de lagunages mal conçus est le colmatage (sédimentation des particules en suspension) des supports de plantation au bout de quelques années.
Nettoyer un filtre de 200 L ou plus en retirant des filets remplis de matière
filtrante, des mousses, est quand même nettement plus facile que de retirer
plusieurs centaines de litre de pierre de lave en vrac... et recouverts de
plantes. Le lagunage, utilisé seul, ne peut pas être conçu avec les mêmes
bases qu'une filtration de type tonneau ou multichambres.
En effet pour une filtration classique, la pompe
est placée dans la zone la plus profonde du bassin et est légèrement
surélevée afin de laisser un peu de vase au fond du bassin. Tout le reste est
envoyé dans le filtre qui sera purgé régulièrement et certains compartiments
seront nettoyés de temps à autre en fonction du colmatage des masses
filtrantes.
Dans le cas d'un lagunage classique (filtration
exclusive) toute action
d'entretien est pour moi, je le répète, impossible. La zone est plantée et retirer
plusieurs centaines de litres de pierre de lave, me parait être une action
pénible à réaliser. Pour éviter le colmatage de la lagune il faut mettre la
pompe de filtration moins profondément dans le bassin. De ce fait on assiste
parfois à un envasement plus rapide de ce dernier.
L'avantage du lagunage réside dans son
intégration parfaite dans le jardin. Il apporte une touche végétale
supplémentaire et ne doit pas nécessiter d'entretien, à part un ensemencement
bactérien régulier.
Les inconvénients peuvent être, en cas de
mauvaise conception, un colmatage. La surface au sol est importante : 40% du volume du
bassin. Ainsi un bassin de 20 m³ nécessite une lagune de 8 m³. Avec une
profondeur moyenne de 50 à 60 cm, cela représente une surface de 16 m². Ces
chiffres sont à personnaliser selon l'implantation du bassin, l'exposition au
soleil et la situation géographique.
La construction de la lagune est
relativement aisée. On peut utiliser un récipient rigide de grande taille ou
bien se servir de bâche prise en sandwich entre deux couches de feutre épais.
L'eau va arriver par un drain posé en rond sur le fond du lagunage, prévoir une vanne
de vidange qui permettra d'éviter un colmatage. (complément
sur le lagunage)
La lagune sera remplie sur une hauteur de 20 cm de
Bio Balles, puis le reste sera comblé avec de la pierre de lave de 10/15 mm de
granulométrie. Si une granulométrie inférieure est utilisée, le risque de
colmatage est plus grand. Le niveau d'eau de la lagune sera obligatoirement au-dessus du niveau du bassin (retour par gravité). Le retour sera protégé par
une crépine afin de permettre un bon écoulement de l'eau sans risque de
débordement.
La pompe alimentant le lagunage permettra le passage
de la totalité du volume du bassin toutes les 4/5 heures environ. Pour un bassin
de 20 m³ il faudra prévoir une pompe,
ayant un débit au niveau de la lagune, d'environ 4,5 m³/H.
Attention il ne s'agit pas du débit annoncé de la pompe mais bel et bien du
débit réel tenant compte des pertes de charge (hauteur de refoulement,
longueur du tuyau, drain... ).
Pour ma part, je préconise le lagunage en
complément d'une filtration classique. Les plantes peuvent ainsi épurer
l'eau des nitrates, phosphates, et éventuellement des traces de métaux lourds
présents dans l'eau du bassin. Les plus gros éléments sont stoppés par la
filtration classique, tout risque de colmatage de la lagune est ainsi écarté.
On se rapproche ainsi plus du principe des stations d'épuration (MES filtrées
au préalable).
Il est évident que les végétaux seront plantés
sans terre, directement dans le lagunage. Pour choisir les espèces il existe un
tableau (repris en partie ci-dessous) recensant les végétaux les plus utiles
pour le lagunage. La profondeur indiquée correspond à l'immersion moyenne.
Excepté pour l'aponogeton et les sagittaires, toutes les autres espèces acceptent d'avoir seulement le
collet légèrement au dessus du niveau de l'eau.
Nom des plantes
Utilité
Attrait
Prof.
Remarques
Acorus calamus
variegatus
25
85
- 10
Variété panachée
très décorative
Alisma sp
25
65
- 15
Se ressème
facilement
Aponogeton
distachyos
35
100
- 30
Supporte l'ombre,
colonise facilement
Butomus umbellatus
50
80
-10
Ombelle rose
décorative
Caltha palustris
30
100
- 5
Floraison et
végétation printanière
Carex sp.
30
50
- 5
Bonne colonisation
Cyperus longus
50
75
- 15
Forte colonisation
Glyceria maxima
75
75
- 10
Bonne croissance
Hippuris vulgaris
85
75
-30
Feuillage original
Iris pseudacorus,
versicolor
50
100
- 20
Floraison printanière
Juncus sp.
50
70
- 10
Forme des touffes
assez compactes
Mentha aquatica
75
75
- 10
Floraison estivale
Menyanthes trifoliata
75
75
- 15
Floraison printanière
Oenanthe aquatica
variegata
70
70
- 15
Variété à
feuillage panaché
Phalaris
arundinacea
70
50
- 15
Bonne colonisation
Phragmites
australis et var.
70
60
- 10
Feuillage panaché
intéressant
Plantes flottantes
90
90
0
(Eichhornia,
Pistia, Lemna, Trapa ...)
Plantes
oxygénantes
100
50
-50
(Elodées, Tillae,
Myriophyllum ...)
Preslia cervina
50
70
- 10
Floraison abondante
bleue (ou blanche)
Ranunculus flammula
et lingua
80
80
- 15
Floraison jaune
Sagittaria sp.
80
100
- 15
Déphosphatante,
floraison blanche
Saururus cernuus
70
80
-15
Feuillage
intéressant
Scirpus lacustris
et var.
50
100
- 50
Variétés
panachées très décoratives
Stachys palustris
80
100
- 10
Bonne colonisation
Typha sp.
70
90
- 15
Forte colonisation
Typha minima et
latifolia var.
70
90
0
Ne supporte pas
l'immersion
Zizania latifolia
70
90
- 15
Grande végétation
(2 mètres)
Pour
être efficace, le lagunage doit fonctionner en permanence. Si la pompe peut
être remontée plus près de la surface, il peut rester actif l'hiver (réduire
le débit de la pompe) et ainsi éviter la formation de glace sur une partie du
bassin et permettre la continuité des échanges gazeux. Il faut savoir qu'en
dessous de 5° C l'activité des bactéries est stoppée et qu'en dessous de
10° C l'activité est très faible.
Mon
avis : ce système de
filtration convient très bien pour les mares naturelles et est à déconseiller
pour les bassins à Koï, à moins que ce ne soit en complément d'une
filtration classique.